Encres de tatouage : vers une réglementation interdisant la couleur

Encres de tatouages de couleurs
Encres de tatouages de couleurs

Alors que la pratique du tatouage se démocratise de plus en plus, que le tatouage s’affiche partout (publicité, télévision, cinéma) et que les préjugés sur les tatoués faiblissent autant que la population encrée augmente (1 français sur 10 serait tatoué aujourd’hui), la profession des tatoueurs fait face à une crise de légiférite aigue qui pourrait s’avérer d’une gravité sans précédent. La faute à un arrêté de mars 2013, consolidé en Juin dernier, qui, discrètement, et sans relai médiatique majeur, fixe de manière extrêmement restrictive la liste des substances interdites dans la composition des encres de tatouage.

On pourrait se féliciter d’une telle initiative, visant à sécuriser la pratique et au passage à protéger la santé de nos concitoyens menacée par des encres aux compositions pouvant susciter des réactions cutanées impromptues. Le problème de l’arrêté en question, c’est qu’il vient en contradiction avec d’une part la législation européenne, faisant ainsi de la france la patrie la plus restrictive en la matière en Europe, et d’autre part avec les études médicales déjà menées par ailleurs, et démontrant l’innocuité des encres de tatouage déjà réglementées par la profession.

(Voir le texte ici : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=77DF2CF392DC01F95A560238DA9E4D3E.tpdjo12v_2?cidTexte=JORFTEXT000027167179&dateTexte=20131117 )

L’arrêté restreint donc les possibilités d’utilisation par les tatoueurs des encres colorées à une peau de chagrin. Les cadors de la profession, dont le fameux Tin-Tin, ainsi que le Syndicat National des Artistes Tatoueurshttp://www.s-n-a-t.org/ ) s’insurgent contre cet arrêté qu’ils jugent inadapté et incohérent.

Si un délai d’application a été accordé en Juin suite à une demande du SNAT, l’arrêté est censé entrer en vigueur le 1er Janvier 2014, interdisant ainsi l’utilisation sur le sol français (mais bien entendu pas dans le reste de l’Europe), de la majorité des encres pigmentées permettant la réalisation de tatouages en couleurs. Tatoueurs, médecins et fournisseurs rassemblent actuellement des données européennes d’analyse de certaines substances interdites par l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé). Lesdites substances étant autorisées au niveau européen grace notamment à des études et réunions d’experts menées par le CTL (Chemical-Technological Laboratory, laboratoire allemand certifié par Bruxelles pour les produits de tatouage), le BFR (Institut Fédéral pour l’évaluation des risques), et actuellement le European Congress on Tattoo and Pigment Research.

Il faut savoir que le SNAT n’a pas attendu l’état pour tenter de réglementer la profession et pour participer à sa professionnalisation, pour une pratique du tatouage la plus sécurisée possible pour les tatoués. Notamment en luttant contre la pratique à domicile et « au noir » du tatouage. Comme le dit Tin-tin dans sa longue missive adressée aux directeurs de la DGS et de l’ANSM, cet arrêté aura des conséquences néfastes et probablement à l’encontre du but recherché, les tatoueurs ayant alors 2 solutions :

(Source complète ici : http://tatouagedoc.info/forum/viewtopic.php?p=7831#p7831)

 » – Soit bannir la majeure partie de leurs couleurs de leurs étagères et effectuer exclusivement des travaux en noir, blanc, gris, vert ou bleu (palette très limitée pour ces deux dernières couleurs) ;
– Soit continuer à utiliser leurs couleurs habituelles, autorisées sur l’ensemble du territoire européen à l’exception de la France, et se trouver par conséquent en situation d’illégalité.

Dans le premier cas, ceux qui ont la possibilité de se déplacer hors de nos frontières pourront réaliser occasionnellement des travaux en couleur dans n’importe quel pays de l’Union européenne. Dans la continuité de cet usage de la profession basé sur l’échange professionnel, les enseignes françaises se trouveront elles, dans l’impossibilité légale d’accueillir la majeure partie des artistes étrangers.

Les personnes tatouées sur le territoire français, qui représentent le nombre non négligeable d’une personne sur dix en France en 2010 (*), se trouveront quant à elles face à l’alternative suivante :

1° Cesser de faire réaliser les tatouages multicolores que la plupart d’entre elles portent pourtant depuis des années sans qu’aucune complication ou problème cutané ne soit apparu ;

2° Continuer à se faire tatouer leurs couleurs favorites de manière clandestine, soit par un professionnel exerçant alors dans l’illégalité au regard de l’arrêté, soit par un tatoueur non déclaré et non formé, ce qui est particulièrement alarmant.

Au vu du fléau du tatouage clandestin et à domicile que nous dénonçons avec force depuis plusieurs années, la seconde alternative engendrera immanquablement une augmentation des complications cutanées et sans aucun doute des problèmes d’infection, et ce sans qu’aucune traçabilité, contrôle ou recours ne soit rendu concrètement possible hors plainte particulièrement étayée auprès du Procureur de la République.

Régulièrement destinataires de témoignages de personnes victimes de tatoueurs non déclarés, nous savons qu’une telle démarche est trop rare, même avec l’appui d’un certificat médical. D’où la rareté des interventions des ARS en ce sens.

« 

Vous êtes tatoués – Vous souhaitez le devenir – Vous êtes contre ce qui serait une véritable atteinte à toute une profession liée directement à votre passion pour le tatouage, qui est, rappelons-le, une pratique ancestrale, vous pouvez participer à la protestation en signant la pétition lancée par Tattoo Lifestyle, et que nous nous faisons un devoir de relayer pour que beaucoup plus de bruit soit fait autour de cet arrêté :

https://secure.avaaz.org/fr/petition/Non_a_larret_des_couleurs_des_tatouages/